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Fouta-découverte, le blog Fouta Djalon

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Images, impressions, infos sur le Fouta Djalon en Guinée (Conakry) pour les amateurs de rando/treks et d'un tourisme de découverte


La Guinée en toute humanité par Bernard Du Four

Publié par fouta-decouverte sur 30 Novembre 2024, 19:27pm

Catégories : #Contribution de voyageurs, #Au quotidien, #Guinée

Sillonner les routes de la Guinée, c'est bien sûr partir à la découverte de paysages magnifiques, de sites naturels variés et préservés sur des routes et des pistes empoussiérées.

Mais c'est aussi, et peut-être surtout, partir à la rencontre de personnes et de personnages, de visages parfois graves mais le plus souvent souriants, qui donnent à cette découverte toute sa force et son humanité.

Merci à Bernard Du Four pour ce texte et ces photos prises au cours de son séjour en Guinée en Octobre 2024.

La Guinée en toute humanité par Bernard Du Four
La Guinée en toute humanité par Bernard Du FourLa Guinée en toute humanité par Bernard Du Four
La Guinée en toute humanité par Bernard Du Four

La Guinée, pays des milles éclairages.

Où le réseau est Orange et le téléphone Tecno.

Où le foot est Roi et les Éléphants des stars.

Où "ça va un peu" et on marche "un peu loin".

Où rien n'est facile, mais tout est possible.

Où les couleurs sont multiples et les mototaxis omniprésents.

Où la nourriture est douce et le vin de palme encore plus.

Où on ne jette rien sauf le plastique.

Où les femmes travaillent dur et les hommes souffrent.

Où la déforestation est effrayante et la corruption galopante.

Où tout est nu et tout est couvert.

Où on pousse un peu et on rit beaucoup.

Où il pleut très fort et le soleil est brûlant.

Où Guilux est bu et pastis est savouré.

Où les Chinois sont partout et la justice nulle part.

Où les marchés sont bruyants et le nuits épuisantes.

Où on est ensemble et jamais seul.

Où il faut prier un peu et patienter beaucoup.

Où la jeunesse à ses bars et les grands leurs cours.

Où on part en brousse, retourne au village et s'envole en Europe.

Où È, Éee, Eij, Ah, Oh Ooo, heii ! font toute une langue.

Où la richesse est partout mais presque uniquement dans les cœurs.

Où on coupe la peau et on "torche" la nuit.

Où les enfants sont nombreux et les gens sont tellement beaux.

Guinée où la vie se vit.

La Guinée en toute humanité par Bernard Du Four
La Guinée en toute humanité par Bernard Du FourLa Guinée en toute humanité par Bernard Du Four
La Guinée en toute humanité par Bernard Du Four

À Abdoulaye, moto-taximan et gérant d'une petite boutique à Kaporo qui rêve d'une carrière militaire, a suivi la formation initiale mais "Je n’ai ni les moyens financiers ni les connections pour devenir soldat".

À maman Kondé, qui vit de sa petite pension à Ratoma et a vu partir tous ses enfants en Europe et aux États-Unis et qui m'a confié que "mon mari - Dieu ait son âme -, travaillait chez la Banque de Guinée. Je lui disais : "T'as tout là-bas, si tu voles pas là, tu vas voler où ?"

À Agnès française -  infirmière dans le dispensaire St Gabriel à Matoto - un institut implanté en Guinée depuis 1987 - qui vit avec son mari et leurs trois enfants parmi la population de Conakry et qui ensemble avec ses collègues fait des miracles chaque jour. Avec des moyens très limités, le dispensaire aide chaque année plus de 1200 femmes à accoucher tout en demandant un prix unique très bas (40.000 FG / 4 EUR) et réussit à s'autofinancer pour 66%. Ici à Conakry, la ville qui ne cesse de grandir, les gens sont déracinés, ils vivent entre deux mondes, ils n'ont plus la sagesse traditionnelle des générations, où encore 90% !!! des filles/femmes subissent des mutilations génitales. Tout le monde (ONG) y travaille, personne n'y réussi. La pratique est ancrée très fortement dans la culture guinéenne. Ton corps n'appartient, essentiellement, pas a toi, mais à la communauté.  

À Alsény, percussionniste, plein d'énergie avant-hier, abattu aujourd'hui par le palu.

À Mamadou, chauffeur de taxi, qui parle couramment cinq langues mais qui sera bien probablement chauffeur jusqu'à la fin de ses jours.

À la rayonnante Fatim, danseuse très talentueuse au Ballet National de Guinée à Dixinn, qui est une des espoirs de son quartier. 

Aux innombrables jeunes de Kaporo, le quartier de Conakry qui vient de se doter d'un nouveau chef de quartier, qui espèrent une amélioration/de nouvelles opportunités grâce au nouveau chef.

Aux hommes de Matoto, joueurs du lotto, qui espèrent gagner le gros lot toutes les heures. 

À Soeur Marie-Emilie de la congrégation Apostolique de sœurs sénégalaises qui essaie de bâtir un petit dispensaire au village à 6km de la route de Friguiagbé, mais qui est retardé par le vol des matériaux et le taux de change fluctuant qui fait qu’il lui manque maintenant 180.000.000 FGN (18KEUR) pour ouvrir son tout petit dispensaire.

Aux plus beaux enfants Lysmée Adama, Louis Oury et leur trop charismatique maman  Aude qui sont apparus dans la noirceur d'un orage. Elle m'a raconté sa vie rocambolesque en Afrique en parlant plus vite que son ombre lors d'une longue et douce nuit au Monastère des Bénédictines de Friguiagbé.

La Guinée en toute humanité par Bernard Du Four
La Guinée en toute humanité par Bernard Du FourLa Guinée en toute humanité par Bernard Du Four
La Guinée en toute humanité par Bernard Du Four

À maître Jean et madame Fatou, enseignants d'une classe de première et seconde année. Ensemble une soixantaine d'élèves enseignés dans la science d'observation et la manifestation de la vie :  

" L'homme naît, se développe, se reproduit et meurt. L'homme vit.

La plante naît, grandit, se développe et meurt. La plante vit.

L'animal naît, se développe, se reproduit et meurt. L'animal vit."

À la gendarmerie routière de Guinée qui essaie d'arrêter le trafic sur la grande route pour contrôler les papiers et fatiguer les chauffeurs, mais qui est ignorée une bonne moitié du temps par les chauffeurs qui brisent le feu et qui ne s'arrêtent pas.

À Hajdara, en route pour Kindia, avec ses prières dans son beau 4x4.

À Ousmane et Lamé Sidibé, chauffeurs de camion de Macenta qui font le trajet Nzérékoré - Conakry 2 à 3 fois par mois et pour le reste des 'petites courses'. Trajet aller : bananes et aubergines. Trajet retour : huile rouge, sardines et oignons. Ils rêvent de doubler leur salaire de 2.500.000 FG  en allant travailler pour la Société de Simandou, le plus grand gisement de fer au monde non encore exploité, qui contient assez de fer (2.4 Mia tonnes) pour rendre chaque Guinéen riche. Mais ils savent déjà très bien où les revenus vont aller, parce que "Ça c'est la vie".

À Fatoumata, "serviteuse" de pompe sur la route de Mamou, magicienne dans sa profession, qui sait faire le plein, plein, plein, plein.

À Bakar Diallo, "original from Sierra Leone - born in Guinea - because of war my friend".

Au sergent en chef militaire avec qui on a passé une belle nuit au bar des Forestiers à Mamou ensemble avec ses amis. Le sergent en chef défend la frontière avec le Sierra Leone, non pas parce qu'on craint une invasion ; au contraire, pour éviter des insurrections de l'autre côté. Lui, il est d'ailleurs prêt à aider le Mali contre les islamistes parce que ceux sont comme nos frères. Qui dit que : " chaque région à sa réalité. Et qui est très fâché que les Africains ne sont pas les bienvenus en Europe. D'autant plus qu'ils ont empoisonné l'Afrique avec une religion qui n’est pas le leur. Adam et Eve n'étaient pas noirs quand même. Qui dit que l'armée (et la Junte du Président Doumbouya) est là pour mettre de l'ordre dans le pays qui souffre de beaucoup de maux.  Oui, oui, mais combien de temps ça pourrait durer (ce régime militaire) ? Ah d'abord le général doit mettre les points sur les i."

Au monsieur, qui a débarqué dans le bar au milieu de la nuit en déplorant, "Ma femme va me mettre en prison pour 30.000 FGN !"  et qui a riposté avec "Ah oui, c'est ça l'amour".

À Abdelramane, maître d'hôtel à l'hôtel Baly's à Mamou, qui trouve que Trump est un idiot total mais qui va quand même gagner et déclare que "Israël fatigue le monde". Quant aux militaires : il a ses idées. 

À Ludovic et sa femme, qui ont le meilleur job du monde : filmer les plus beaux endroits du monde pour le magazine "Hors frontières".

La Guinée en toute humanité par Bernard Du Four
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La Guinée en toute humanité par Bernard Du Four

À Bello, notre chauffeur taxi-brousse, qui nous amène à Nzérékoré en style "Rallye" .

À Alpha Mamou Baldé, étudiant, débutant des études de génie d'environnement, qui est supporter du Barça et qui pourrait, s'il obtient son diplôme, aider à reforester la Guinée : "ça paie bien" mais qui voulait en fait entamer des études de médecine malheureusement trop chères avec des frais d'inscription de 17.000.000 FGN par année.

À la très, très belle femme à la gare de Mamou qui allait à Kissidougou et qui a refusé trois fois de se laisser prendre en photo mais était fort charmée et m'a salué chaleureusement, pleinement consciente de sa séduction.

Au serveur à Faranah, tellement gentil et tellement gai.

À Alfred, ardent écouteur de Radio France International, qui, dans son petit village au milieu de la brousse sans courant, est parfaitement au courant de tout ce qui se passe dans le monde. "J'espère que Kamala Haris va gagner mais je crains ce sera Trump."

À Marie 15 ans, huitième année, fille d'Alfred qui nous a préparé des délicieux escargots à la sauce feuilles de manioc.

Aux femmes aux champs de Zedoya, qui coupent le riz pour 20.000 FGN (2 EUR) par jour au soleil brûlant. Eh oui, c'est ça la pauvreté (cadre de référence: pour 20.000 FGN, on peut acheter 2.5 kg de riz ou 3 bières ou 3 coca cola ou 2 baguettes).

À Sibu qui m'a montré comment récolter le vin de palme et qui a le plus beau sourire du village. Inutile de dire que de la concurrence, il y en a.

À Balu qui m'a montré ses beaux champs de riz et de manioc et qui m'a appris comment produire du charbon. Le bois est couvert par des feuilles de palme et de la terre et puis on met le feu, et qui m'a répondu quand je lui demandais si personne du gouvernement n'était jamais venu pour dire qu'il doit arrêter de brûler la forêt : "Non jamais, ici c'est chez nous. La forêt, c'est pour les blancs et ils n'ont même pas commencé à l'exploiter. Ca fait au moins 20 ans qu'il ont la forêt et il font rien avec, rien!"

À Odilon Loua, infirmier en stage, qui espère avoir un poste définitif (1million FGN/mois). "Ça, ça dépend de mon comportement et mon travail."

La Guinée en toute humanité par Bernard Du Four
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La Guinée en toute humanité par Bernard Du Four

À Christine et la famille de Abou qui m'ont accueilli avec tant de chaleur au village "Aooo Aooo - soyez le bienvenu" et avec qui c'était tellement magique de partager le pastis et le vin de palme sous un ciel éclairé de milles éclairages silencieux.

À Kokolikonouveau né au village de Luewouata, qui a été accueilli par une nuit de chants et du djembé joué par les villageois.

A Martin Fodé, agriculteur du café, qui m'a guidé dans la forêt des Monts Nimba protégée par l'Unesco et qui m'a appris à marcher doucement dans la forêt, et surtout que je suis con de payer une petite fortune pour m'épuiser complètement dans cette forêt. "T'inquiètes, là-bas il n'y a pas de serpents. Ici par contre, il y en a plein."

Au militaire de la promotion de 2008 qui m'a reconnu et m'a laissé passer au barrage militaire. Qui est allé au Mali là-bas : "il n'y a rien pour se battre contre les islamistes. Ils se découragent jamais ceux-là."

À l'homme à Macenta avec qui s'était agréable de parler politique en buvant un café noir. "Bon, le Président Doumbouya est dans son fauteuil et devant lui il y a des diamants, de l'or, de la bauxite et de l'aluminium. Eh !! Il va donc bien rester dans son fauteuil."

Aux jeunes, dans un tout petit village à 30 km de Mamou, où on s'est retrouvé bloqué après 24h de route et 2 pneus morts. C'est finalement la boîte de vitesse qui nous a battu. Les jeunes construisent le chemin de fer qui doit connecter la maintenant déjà légendaire mine de Simandou avec le port de Conakry. Ils travaillent tous 7 jours sur 7 pour 40.000 FGN (4EUR) par jour et rêvent tous d'aller en Europe. "Ils nous font travailler dur, très dur et ils connaissent pas les dimanches ces Chinois."

À Mgr Francois, évêque de Conakry, qui a donné un prêche splendide lors de sa visite à la petite Paroisse de St Michel à Dabala. "Le christ est fait pour être heureux."

Aux adorables sœurs André-Marie et Denise, porteuses spirituelles de la petite communauté catholique de Dalaba.

Aux nombreux Guinéens. "Avant, il y a 20 ans, on voyait pas ça (le Niqab) ici. Maintenant tu les vois partout."

La Guinée en toute humanité par Bernard Du Four
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La Guinée en toute humanité par Bernard Du Four

Aux villageois de Hakkounde, un des dizaines de petits villages pauvres qui se sont dotés d'une toute nouvelle mosquée. "Cadeau de l'Arabie-Saoudite quoi."

À Alpha Oumar qui m'a hébergé et m'a orienté vers les chutes de Ditinn. "C'est rare de voir des singes ici. Avant il y en avait beaucoup, mais bon  ils mangent les bananes des plantations, donc oui, c'est fini avec eux quoi."

A Alpha Oumar, jeune DJ animateur stylé de la boîte de nuit à Ditinn qui a comme idole le rappeur tanzanien Diamond et qui aime bien le rap Américain. "Eminem?" "C'est qui ça?" "Jay Z ?" "Jamais entendu", "Beyoncé ?" "Ah oui Beyoncé, elle est géniale."

À Moukhtar, notre guide lors d'une merveilleuse randonnée dans le Fouta. "Avant il y avait des hyènes ici, mais bon elles mangent les moutons et nous, les Peuhls, on est des éleveurs, donc..."

À Mamadou, autre guide au Fouta : "donc ton père a fait le choix conscient d'avoir qu'une femme ?" "Oui." "Pourquoi ?" "Moins de problèmes."

À Ahmad, mon hôte dans le tout petit village Peuhl de Saada. "C'est mon village ici, mais moi je suis à Abidjan."

À ma moto TVS, qui m'a emmené partout en Guinée. Quelle ingéniosité de technique, cette petite machine 125CC. Imbattable!

La Guinée en toute humanité par Bernard Du Four
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À Gabriel, qui nous a offert un café noir à Boffa. Gabriel, comme l'envoyé de Dieu ? "Oui sauf qu'Il a la tendance à m'oublier."

Aux joueurs de pétanque de Boké contre lesquels j'ai gagné toutes mes parties;)

Au comptable de la gendarmerie à Boffa : "c'est très difficile. Si tu veux faire du bien, ils te mettent des bâtons dans les roues de tous les côtés. Alors t'es obligé à aller à l'encontre de ta conscience."

Au gentil M. Diallo : "le monde entier est ici (en région des mines) les Chinois, les Emiratis, les Indiens, les Anglais, les Américains, les Russes,... C'est jamais bon signe."

Au prof. Marie-Constance, directrice à l'Institut  Supérieur des Mines et de Géologie de Boké. Femme admirable. "La Guinée est un scandale géologique. Toutes les sociétés minières ont obtenu leur concession en promettant de construire également une usine de reconversion en Guinée. Aucune d'entre elles n'a tenu cette promesse." " La Guinée a encore des réserves de bauxite pour 50 ans… la poussière ne fera qu'empirer."   

Aux habitants de Boké et Kamsar, villes sous la poussière rouge : "Partez de là, la poussière vous tue !"

À tous les Guinéens et Guinéennes : "ON VOUS VOLE ! On vous vole en plein jour. On vous vole à une échelle massive ! On vous vole des millions de dollar par jour ! Pour les grandes sociétés minières, l'argent est littéralement à portée de main. Il leur suffit de ramasser la bauxite et le tour est joué."

À Tonton Fredo à Bel-Air, plein d'histoires : "Je suis dans la pêche maintenant, mais tu sais c'est pas pour la pêche. C'est juste histoire d'occuper son esprit".

Aux pères Spiritains de Boffa. "L'Europe a perdu sa tête. D'abord ils nous - les Africains-  ont noyé dans le Christianisme et maintenant ils disent : "oui mais laisse tomber,  en fait ça vaut pas la peine"."

À Quentin et Marie, mes anges gardiens en Guinée, qui m’ont accueilli avec tant de chaleur.

 

Moi Bernard Du Four, visiteur de votre pays  vous remercie. Merci infiniment. Merci de tout cœur, merci jusqu'à la lune et retour, jusqu'aux étoiles et retour pour votre amabilité, votre hospitalité, votre art de vivre, votre amour.

La Guinée n'a pas son deux.

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