Depuis les villages et les hameaux de la brousse environnante, la famille, les amis et affiliés convergent vers la concession à célébrer.
Pas question de ne pas se déplacer ; tout au moins faut-il se faire représenter.
Ici les affaires sociales ne sont pas une option, difficile de les ignorer.
Elles sont un mode de vie en société que chacun se doit de respecter, pour exister.
Boubous amidonnés et bazins riches colorés, peu à peu convergent et se confondent.
Au rythme du froissement des tuniques empesées, les convives se rassemblent.
Dans une agitation feutrée, majestueux drapés et broderies aux reflets mordorés peu à peu composent une assemblée magnifiquement bigarrée.
Foulards de tête artistiquement élaborés et chamarrés,
koufounés traditionnels brodés, fièrement coiffés,
tresses et nattes ornées de perles et de cauris,
coiffes en cimiers, véritables œuvres d’art capillaire ciselées,
arabesques de henné, sur des peaux diaphanes, tatouées,
rien n’est trop beau pour honorer les hôtes de cette journée.
Ce ballet millimétré, quoique improvisé, se déroule dans une effervescente tranquillité,
pour fêter un nouveau né et le nommer, le bercer de bénédictions et de prières ;
pour célébrer l’union sacrée de deux lignées, de deux familles, de deux êtres ;
pour honorer la mémoire d’un disparu, commémorer un évènement profane ou sacré.
Les salutations sont interminables, impossible d’y déroger,
«Ko tooli» «On dyaramaa» «On bellike e jam ?» «Jam tun»... *
L’occasion d'adresser ses souhaits les meilleurs et de partager les dernières nouvelles de la parenté,
«Beyngure nden no e jam ?» «No yourmi» «Yo Allah wurnu boobo on barkina»...*
«Ko yettude Allah»*
Chacun apporte sa contribution qui est consciencieusement enregistrée.
Calebasses et marmites de victuailles sont exposées avant de pouvoir être honorées.
Souvent une bête est sacrifiée, gage de respect pour tous les convives rassemblés.
Mais au final rien ne saurait rester, tout sera soigneusement partagé.
Et puis le temps d’un instant, prières et bénédictions viennent mettre toute l’assemblée au diapason. Tous les convives se figent alors dans une même dévotion.
Avant qu’un éclat de voix, quelques notes perçues de loin en loin n’annoncent dans un tumulte maitrisé, l’arrivée de griots venus déclamer les louanges d’éminents membres de l’assemblée, et de leur parenté.
Au Fouta, fêter c’est avant tout se rassembler et partager.
Ko tooli !
* Ko tooli : La Bienvenue
On dyaramaa : Je vous salue
On bellike e jam ? : Avez vous dormi en Paix
Jam tun : La Paix seulement...
Beyngure nden no e jam ? : La famille va bien ?
No yurmi ? : C'est triste
Yo Allah wurnu boobo on barkina : Que le bébé vive longtemps et soit béni
Ko yettude Allah : Grâce à Dieu