Tissage de lianes en forêt
Les Tomas seraient ils les « Spider men », version forêt sacrée, de la Guinée ?
Drôle de question me direz-vous ?
Et pourtant, à observer les ponts qu’ils réalisent et entretiennent depuis des générations au sein de la forêt, on est en droit de se la poser, non ?
En tout cas, cela donnerait un début de commencement d’explication à ces aménagements si incroyablement suspendus dans l’espace, venus jusqu’à nous du fin fonds de temps immémoriaux, et qui se fondent à la nature environnante comme en autant de prolongements d’elle-même.
Car à vrai dire plus on les détaille, plus on essaye de les comprendre, plus on se dit qu’ils ne peuvent être que le résultat d’une communion, d’une conjonction de forces plus que naturelles ; surnaturelles.
Et puis, ils ont quand même bien des ressemblances troublantes avec d’immenses toiles tissées par quelques membres agiles, ces fameux ponts de lianes.
Alors devant l’absence de réponse claire, logique, cartésienne, la tentation est grande d’attribuer à leurs créateurs des pouvoirs au-delà de ceux du commun des mortels.
Les Tomas des « Spider men » ? Et pourquoi pas ?
Une chose est sûre, ils entretiennent soigneusement le mystère, en refusant catégoriquement d’en dire plus sur leurs savoirs et savoir-faire, répétant à l’envi que seuls les initiés savent et seuls les initiés doivent savoir comment sont réalisés et installés ces ouvrages. Les autres doivent rester dans le flou du mystère, dans le brouillard de l’ignorance, dans le questionnement sans fin.
Et d’ailleurs, vous savez vous si ce sont les lianes qui s’élancent vers la cime des arbres pour s’y agripper ou bien au contraire si ce sont les branches de ces arbres qui se prolongent, se projettent d’une rive vers l’autre dans un élan naturel pour se rejoindre et former ses immenses nasses ?
Vous le savez ? Et bien quant à moi, je ne suis plus très sûr…
Mais maintenant, imaginez un instant ! Si vous prenez comme « vérité vraie » que les Tomas sont les « Spider men » de la Guinée forestière alors de fait tout devient clair, évident.
Imaginez !
D’un simple mouvement de la main et du poignet, voilà que nos « Spider men » forestiers projettent les lianes, patiemment prélevées dans la forêt voisine, à plusieurs mètres au-dessus de la rivière, les faisant s’enrouler autour des frondaisons et s’y arrimer solidement. D’un autre geste imperceptible des doigts voilà que déjà ils dessinent, tissent le manteau végétal du pont, entrelacement de fibres végétales souples et solides à la fois. Et hop dans un dernier élan de leurs avant-bras, ils étirent au maximum la structure pour lui donner toute sa rigidité, tout en lui préservant une grande souplesse. Spidernesque !
Imaginez donc ! Fin du mystère… fin du questionnement…
Ah oui mais non, la fin du mystère ? Mais ce serait rabaisser ces magnifiques ouvrages artistiques et quasi mystiques au rang de simples ponts, banales voies de passage, tout juste utiles au quotidien pour les populations locales qui les traversent ; ce serait les réduire, les amputer de leur quatrième dimension qui les rend si intensément beaux au cœur de leurs forêts sacrées.
Alors au final, non ! Non ! Pas besoin d’explication !! Non, les Tomas ne sont pas d'improbables « Spider men » mais bien les gardiens de ces incroyables gestations intemporelles, gardiens du mystère, gardiens des mystères à protéger, à pérenniser et à respecter résolument.
PS : faudra vraiment que je garde à l’esprit (décidément un peu trop formaté par des doses de connaissances scientifiques, de raisonnements cartésiens) que non il n’est pas nécessaire, il n’est même pas souhaitable de tout expliquer, de tout comprendre. Il faut savoir laisser la place au mystère, à l’imaginaire, aux génies de la forêt !